Elise Bernard, docteur en droit public et enseignante à Sciences-Po Aix et à l'ESSEC, décrypte chaque lundi sur Euradio les implications concrètes de l'État de droit dans notre actualité et notre quotidien. Ses analyses approfondies, publiées sur la page Europe Info Hebdo, offrent un éclairage précieux sur ce pilier fondamental de l'Union européenne.
L’état de droit ce sont des élections qui permettent aux citoyens de se faire représenter par celui ou celle qui défendra au mieux leurs intérêts mais on voit clairement que depuis décembre, ce point est particulièrement tendu en Roumanie.
Oui, on en a parlé plusieurs fois sur ces ondes. En décembre dernier, la Cour constitutionnelle roumaine a annulé le premier tour des élections présidentielles. Une nouvelle élection présidentielle s’est tenue et le premier tour a vu la victoire écrasante de l’extrême-droite.
Le second tour de cette élection de ce dimanche 18 mai opposait donc George Simion de l'Alliance pour l'unité des Roumains (AUR), un personnage adepte de l’outrance et proche de Moscou et Nicusor Dan de la coalition pro européenne "Roumanie en avant" (PSD, PNL, UDMR).
C’est Nicusor Dan, maire de Bucarest qui est sorti vainqueur avec 54% des suffrages.
Cette élection fait suite à celle annulée du 6 décembre 2024, où Călin Georgescu, un ultranationaliste proche de la Russie, était arrivé en tête du premier tour avec environ 23% des voix.
Alors là, George Simion avait déclaré vouloir "porter Călin Georgescu au pouvoir et maintenant il demande l’annulation de ce scrutin du 18 mai. C’est délicat si en décembre la cour constitutionnelle avait admis l’existence d’irrégularités, ici elle estime qu’il n’y en a pas.
C’est fâcheux pour la décrédibilisation systématique des élections mais le soulagement permis par ce résultat, c’est un enjeu géopolitique qui dépasse la seule Roumanie.
La victoire de Simion aurait sérieusement remis en question le soutien de la Roumanie à l'UE et l'OTAN. Il aurait pu en résulter un bloc de pays au sein de l'UE qui ne soutiendraient pas l'aide militaire à l'Ukraine ou les sanctions contre la Russie.
Oui parce que lorsque la Hongrie de Viktor Orbán est seule, on peut toujours imaginer au niveau du Conseil d’essayer de le contourner ou de négocier.
Avec la Roumanie de ce côté, cela serait devenu beaucoup plus difficile. Elle pèse au Conseil et dans l’OTAN avec ses 19 millions d’habitants, son flanc est frontalier de l’Ukraine et sa côte sur la mer noire. Sans oublier le Premier Ministre slovaque Robert Fico qui apprécie aussi surfer sur la tendance quand cela lui semble bienvenu.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron.