L'éco de Marc Tempelman

L’impact de la guerre

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Chaque semaine sur euradio, retrouvez Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee, qui traite les sujets et les actualités de la finance.

Aujourd'hui, Marc Tempelman, l’entrée en guerre des États-Unis aux côtés d’Israël nous oblige à nous intéresser à l’impact d’une guerre sur les marchés financiers. Lorsqu’un conflit armé éclate quelque part dans le monde, on entend souvent que les marchés financiers réagissent fortement. Concrètement, que se passe-t-il sur les marchés au début d’une guerre ?

Bonjour. Effectivement, l’histoire montre que le déclenchement d’une guerre provoque presque toujours une réaction immédiate des marchés, généralement négative. Les investisseurs détestent l’incertitude, et un conflit armé accroît brutalement les risques géopolitiques et économiques. Par exemple, lors de l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022, le S&P 500 a chuté d’environ 2 % le jour même, et les places européennes ont perdu jusqu’à 4 % en séance. De même, après les attentats du 11 septembre 2001, le Dow Jones avait perdu plus de 7 % lors de la réouverture de Wall Street, une des pires séances de son histoire récente.

Est-ce que ce genre de correction est systématique ? Y a-t-il des moyennes historiques sur l’ampleur des baisses et la durée des rebonds ?

Les corrections sont fréquentes mais leur ampleur varie selon la nature et la localisation du conflit. Selon une étude du Wall Street Journal, sur 29 événements géopolitiques majeurs depuis 1941, les marchés actions américains ont chuté en moyenne de 5 à 10 % dans les jours ou semaines qui suivent. Mais le plus frappant, c’est la rapidité du rebond : en moyenne, il faut moins de 50 jours pour que les indices retrouvent leur niveau d’avant-crise. Par exemple, après Pearl Harbor en 1941, le Dow Jones a perdu 2,9 % en une séance, mais il avait effacé ses pertes en moins de 40 jours. Lors de la guerre du Golfe en 1991, le S&P 500 a chuté de 5 % à l’annonce de l’offensive, mais il a rebondi de 17 % en trois mois.

Certains actifs résistent-ils mieux que d’autres lors de ces épisodes ?

Absolument. L’or est traditionnellement la valeur refuge numéro un : il s’apprécie presque systématiquement lors des débuts de guerre ou de crises majeures. Par exemple, au début du conflit en Ukraine, l’once d’or a dépassé les 2 000 dollars. Les obligations d’État des pays jugés sûrs, comme les Treasuries américains ou le Bund allemand, sont également recherchées. Enfin, les investisseurs se mettent aussi à l’abri en achetant des francs suisses ou des Yens japonais, des pays perçus comme étant sûrs dans des environnements volatils.

À l’inverse, les actifs risqués comme les actions des pays directement impliqués dans le conflit, ou les devises émergentes, sont généralement délaissés. Enfin, les secteurs de la défense et de l’énergie peuvent aussi surperformer : lors de la guerre du Golfe, les valeurs pétrolières et les entreprises d’armement ont progressé alors que le reste du marché reculait.

Y a-t-il eu des cas où le déclenchement d’une guerre a eu un effet positif immédiat sur les marchés ?

C’est rare, mais cela peut arriver. Paradoxalement, lorsque la guerre met fin à une longue période d’incertitude, le marché peut rebondir. C’est ce qui s’est passé en janvier 1991 au lancement de l’opération Tempête du désert : les marchés avaient déjà anticipé le conflit, et l’annonce de l’offensive a marqué le début d’un rallye boursier. De même, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, les marchés américains ont fortement progressé, portés par la perspective de la reconstruction et de la paix. Mais il faut bien distinguer l’effet d’annonce du déclenchement de la guerre, souvent négatif, de celui de la résolution ou du dénouement du conflit, généralement positif.

Pour conclure, quels conseils donneriez-vous aux investisseurs particuliers face à ce type d’événement ?

Il est important de ne pas céder à la panique. L’histoire montre que les corrections liées aux conflits armés sont le plus souvent temporaires et que les marchés rebondissent assez vite. Diversifier ses placements, conserver une part d’actifs refuges comme l’or ou les obligations souveraines, et éviter de vendre dans la précipitation sont des réflexes essentiels. Enfin, il faut garder à l’esprit que le timing parfait n’existe pas : la volatilité immédiate après un déclenchement de guerre est forte, mais les fondamentaux économiques reprennent généralement le dessus à moyen terme.

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.