Les femmes ou les "oublis" de l'Histoire

Marguerite Canal, grande pianiste et mélodiste

© Teamcolibri.org Marguerite Canal, grande pianiste et mélodiste
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Avec sa chronique Les femmes ou les "oublis" de l'Histoire, Juliette Raynaud explore "les silences de l'Histoire" (Michelle Perrot) et nous invite à (re)découvrir notre matrimoine oublié, une histoire après l'autre...

Vous connaissez Marguerite Canal ? Pianiste et mélodiste, elle composa plus de 80 œuvres inventives et poétiques. Elle fut la première cheffe d’orchestre de France en 1917 et la deuxième femme à remporter le premier grand prix de Rome en 1920 en composition musicale.


Marguerite Canal naît à Toulouse en 1890. Elle reçoit de ses parents mélomanes une éducation poussée en littérature et en musique.

A 11 ans, elle intègre le Conservatoire de Paris, où elle étudie la composition.

En 1914, elle se présente au prestigieux concours de composition du Prix de Rome, sans succès. On lui suggère une carrière de chanteuse mais sa passion pour la composition l’emporte.

Elle est la première femme à diriger un orchestre. Elle fait une longue tournée et se produit à Nice, Cannes, Marseille, Bordeaux lors de concerts organisés au profit des blessés de guerre en 1917.

Après plusieurs tentatives, elle remporte en 1920 le premier grand prix de Rome en composition musicale, à l'unanimité, pour son poème dramatique Don Juan. Elle est la deuxième femme à recevoir cette distinction, quelques années après Lili Boulanger.

«Parmi les six cantates exécutées, celle de Mlle Marguerite Canal, second prix en1919, se plaçait si incontestablement au-dessus des autres que la premièrerécompense lui fut attribuée à l'unanimité. Elle se distingua par un sens poétique trèsdélicat, qui s'affirma dès le début du prélude, par une déclamation précise, uneexpression juste, un sens dramatique qui, ne s'attardant pas dans d'inutiles subtilitésd'écriture, sait produire à propos des effets d'autant plus saisissants, souvent, qu'ilssont plus simples. »  - Paul Bertrand pour « Le Ménestrel : journal de musique », 9 juillet 1920

Elle séjourne à la Villa Médicis, l’Académie de France à Rome, à partir de 1921. C’est là qu’elle compose sa Sonate pour violon et piano, sa première œuvre de musique de chambre, une merveille d’inventivité qui évoque le parcours amoureux d’une jeune fille.

Son séjour à Rome est prolifique, elle y compose des pièces pour piano et plusieurs

cycles de mélodies qui marquent les débuts de son importante production, plus de 80 œuvres. Elle produit des œuvres en s’inspirant de la poésie de Paul Verlaine, Marguerite Desbordes-Valmore, Charles Baudelaire...

Son mariage avec le violoncelliste Maxime Jamin est malheureux et elle ne récupérera les droits de nombre de ses œuvres éditées par son mari que tardivement, après un long procès.

Elle retourne enseigner au Conservatoire à partir de 1932, même si elle n’est pas, comme elle l’espérait, titulaire d’une classe d’harmonie, seulement de solfège.

Toute sa vie, elle continue de composer : de nombreuses mélodies, des œuvres pédagogiques, et même un opéra resté inachevé, Le Pays blanc, sur un livret inspiré de Burning Daylight, un roman de Jack London.

Une rue à Toulouse porte son nom depuis peu.